#86 – Construire une pratique marketing responsable

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Sur The Storyline, on se questionne beaucoup sur la transition vers un marketing plus responsable. Et plus largement, vers des pratiques métiers qui soient plus respectueuses de l’humain. 

 

Pour mieux comprendre le rôle des marketeuxx et des communicants dans ce mouvement, nous avons rencontré avec Charlotte Lischer et Coline Didier, co-fondatrices de Social Declik. Cette communauté aide les indépendants à mettre du sens dans leurs missions et à travailler avec des acteurs à impact positif.

 

Après des expériences professionnelles dans le monde de la finance de marché et du conseil, Colline et Charlotte ont décidé de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale pour aligner leurs valeurs à leurs pratiques professionnelles et faire de leur travail un territoire d’engagement. 

 

Ensemble, nous avons discuté de la genèse de leur projet à impact, mais aussi de la manière dont les indépendants, tout comme les salariés, peuvent responsabiliser leurs pratiques métier en se posant les bonnes questions et en adoptant les bons outils. 

 

Remettre de l’impact dans les pratiques métier des freelances 

 

Lorsque Charlotte rejoint Coline dans l’aventure Social Declik, cette dernière a déjà un objectif très clair. Elle veut aider les freelances à trouver des missions à impact.  Ensemble, elles vont poser les premières briques de ce projet qui fait écho à leur frustration commune à ne pas arriver à faire bouger les lignes dans leurs entreprises respectives. 

 

Elles commencent donc par monter une association, pour tester le marché et l’existence d’une réelle demande. Puis, elle passent au statut de la SAS avec un agrément ESUS. Créé en 2014 par la loi Hamon, cet agrément est uniquement délivré aux entreprises qui portent des enjeux sociaux et répondent à certains critères (d’écart de salaire, de gouvernance partagée, etc.).

 

Dès le départ, Coline et Charlotte ont la volonté d’ouvrir leur gouvernance et d’inciter leur audience à co-construire avec elles leur offre. Ce sont les retours d’expérience des indépendants qui font notamment émerger l’idée d’une formation pour développer son propre réseau et monter des projets à impact. 

 

La gouvernance partagée ne se limite de plus pas aux freelances, mais à toutes les parties prenantes de l’économie à impact. Toutes les personnes qui gravitent autour du projet Social Declik peuvent ainsi participer à des comités de pilotage mensuel, et aider le projet à grandir plus rapidement. 

 

Comprendre les enjeux des acteurs de l’impact 

 

Le secteur de l’impact est une nébuleuse très large, dont il est souvent difficile de comprendre les enjeux et besoins. Pour s’y retrouver, Coline et Charlotte conseillent de prendre en boussole les 17 objectifs de développement durable de l’ONU. Elles se positionnent d’ailleurs sur le 17e, qui œuvre pour créer des partenariats entre les 16 autres ODD. 

 

Cet objectif de partenariat implique d’avoir une vision large et inclusive de l’impact. Par exemple, les co-fondatrices n’opposent pas freelances traditionnels et engagés, considérant qu’il s’agit d’un cheminement personnel. Livre à chacun de questionner la manière dont son activité peut être mise à contribution pour créer un monde plus juste !

 

Le freelancing peut en effet être un excellent vecteur d’impact et aider à faire bouger les choses de l’intérieur. On choisit généralement ce statut pour la liberté, mais cela peut aussi être un choix engagé qui permet de décider avec qui et comment travailler. 

Comment maximiser son impact de manière responsable en freelance  ?

 

Pour cheminer vers une activité plus responsable en tant que freelance, la première étape est de se poser les bonnes questions, notamment sur ses pratiques métier. Cela peut consister à réfléchir à la manière dont on peut ajouter une couche de durabilité et de responsabilité à son activité professionnelle. 

 

Par exemple, si on travaille dans la communication, se former au marketing responsable, à la sobriété numérique ou encore à l’écriture inclusive sont de bonnes pistes à explorer. Les développeurs web pourront quant à eux se renseigner sur l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, par exemple.

 

Coline et Charlotte nous conseillent aussi de : 

 

  • remettre en question le besoin et l’utilité de chacune de ses actions. L’objectif, c’est de faire des choses qui sont utiles, et non pas uniquement par mécanisme ;
  • être plus sobre dans l’usage des outils numériques. Ces derniers émettent 4 % des GES (gaz à effet de serre), soit autant que l’aviation civile. Il est donc important de réfléchir au contenu que l’on poste (notamment vidéo). Le Guide de la Communication Responsable de L’ADEME est une excellente ressource pour remettre en question et responsabiliser ses pratiques ;
  • questionner l’accessibilité de son travail. Saviez-vous qu’un tiers des citoyens ne savent pas utiliser les compétences fondamentales du numérique ? Il est donc important de questionner l’inclusivité de ce que l’on produit en ligne…

 

Créer une communauté engagée grâce à l’intelligence collective 

 

Pour créer ce collectif engagé, Coline et Charlotte ont commencé par un sprint chez makesense. Elles qui souhaitaient créer le « Malt de l’ESS » se sont vite rendues compte (grâce à une enquête terrain) que leur cible avait en réalité besoin de rejoindre une communauté. Elles ont donc recentré leur projet sur l’importance du lien humain, de l’échange et de l’entraide. Et notamment sur des sujets qui peuvent créer de l’anxiété.

 

Ce principe d’intelligence collective se traduit notamment dans : 

 

  • la transparence : elles n’ont jamais peur de parler de leur projet. Ni de se nourrir d’échanges pour le faire évoluer ;
  • l’écoute : leur advisory board (composé de ceux qu’elles appellent les Declik Angels) les coachent sur leur parcours d’entrepreneurs et les aident à se détacher de leur syndrôme de l’imposteur. 

 

Pour rester fidèles à leurs valeurs communautaires, Coline et Charlotte ont choisi de garder le collectif ouvert à tous (que les freelances aient suivi leur programme de formation ou non). Cela permet de toucher un public plus large, que les individus en soient au début de leur réflexion ou au contraire trop avancés dans leur cheminement pour nécessiter un réel accompagnement. L’engagement communautaire permet aussi aux membres de monter en compétences, notamment à travers les échanges et les ressources partagées. 

 

Éviter le greenwashing des entreprises – et des freelances 

 

En matière d’impact, on peut jouer le rôle d’allié (en aidant les structures à devenir plus vertueuses) ou celui de l’infiltré (en faisant bouger les lignes de l’intérieur, à l’échelle de son organisation ou d’un projet).

 

Dans les deux cas, on peut questionner la durabilité et l’intention de telles stratégies. Certains indépendants peuvent se sentir le courage d’agir à contre-courant et d’impulser le changement dans des entreprises traditionnelles et peu vertueuses. Tandis que d’autres personnes chercheront plutôt à avoir un impact immédiat sur des petites structures et se détourneront de telles missions, malgré leur utilité. 

 

Pour mettre au clair leurs intentions, Charlotte et Colline échangent avec chaque freelance avant qu’il ne rejoigne la communauté. Cela leur permet de détecter s’ils ces derniers sont opportunistes ou sincères dans leur démarche. Mais aussi. d’évaluer leur degré de sensibilisation et d’engagement (dans le pro comme le perso). 

 

Pour autant, il est aussi important d’être bienveillant et de comprendre que l’on ne peut ni être parfait ni vertueux à tous les stades de son activité. C’est particulièrement le cas lorsque l’on se lance et que l’on doit se faire connaître. Non seulement on a pas toujours les moyens et le temps de questionner et responsabiliser toutes ses pratiques. Mais on dépend aussi d’outils imparfaits (comme les réseaux sociaux, et internet de manière générale) pour se faire une place. 

 

Tout l’enjeu est de rectifier le tir lorsque l’on en a la possibilité. Par exemple, Coline et Charlotte ont bidouillé un WordPress à leurs débuts sans trop questionner son impact carbone, inclusivité et accessibilité. Quand elles ont pu le faire 2 ans plus tard, elles ont travaillé avec une freelance de leur communauté pour attaquer ce chantier, passer à l’écriture inclusive et décarboner leur site web. 

 

Grandir en restant fidèle à ses valeurs et engagements initiaux 

 

La question de la recherche de – l’impossible – perfection pose aussi celle de maintenir le cap côté valeurs lorsque l’on commence à grandir.  Les co-fondatrices de Social Declik, maintenant qu’elles sont plus visibles, ont par exemple mis le hola sur leur stratégie social media en réduisant le nombre de leurs publications et en évitant les formats moins écolo comme la vidéo ou les gifs. 

 

Fidèles à l’ODD qu’elles poursuivent, elles misent aussi sur les partenariats avec des structures à impact pour rester ancrées dans leurs engagements d’impact et de durabilité. Elles travaillent ainsi main dans la main avec Tech for Good, MakeSense ou encore Hello Asso pour faire comprendre les avantages du statut de freelance pour le secteur à impact et donner aux structures qui en ont besoin les outils pour porter leur message au plus grand nombre. 

 

Un dernier conseil : derrière les sirènes du marketing responsable, il y a toujours le risque de tomber dans du greenwashing, qu’on le fasse consciemment ou non. Ce que j’ai retenu de cet échange passionnant, c’est que toute pratique peut être améliorable et devenir plus responsable, que l’on soit dans l’impact ou non. Mais ce, à condition de se poser les bonnes questions !

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