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Pour ce nouvel épisode du podcast The Storyline, je vous propose de nous plonger dans l’univers des livres avec Hélène Mérillon, la fondatrice de Youboox.
Après des expériences dans la finance et l’énergie, Hélène s’est lancée à la conquête du monde de l’édition. Elle en accompagne la révolution digitale en s’inspirant des nouveaux modèles de distribution, numériques et illimité. Un pari gagnant, puisque YouBoox travaille aujourd’hui avec 1,500 éditeurs partenaires et a été racheté en octobre dernier par le leader suédois Nextory.
Ensemble, on discute du futur du secteur, dans lequel se côtoient désormais éditeurs et créateurs. On évoque aussi la place que peuvent prendre les marques, en utilisant les livres et leurs auteurs comme de véritables prolongements culturels de leur univers.
Le livre : le dernier bastion culturel à vivre sa révolution digitale
Riche de son parcours professionnel et de son ADN d’entrepreneuse, mais surtout fan de lecture, Hélène lance Youboox en 2011. À l’époque, elle fait partie des premières applications sur l’App Store. L’idée derrière Youboox est justement de s’appuyer sur le développement des smartphones pour révolutionner notre mode de lecture. On peut désormais emporter sa bibliothèque partout avec soi.
Après la musique et le cinéma, c’est donc au livre de vivre sa révolution digitale.
Mais Youboox ne se contente pas de faciliter l’accès aux livres en s’appuyant sur les nouvelles technologies. Hélène a également créé un modèle économique innovant, renversant une industrie jusqu’alors très orientée par l’offre et non par la demande. Si aujourd’hui, le lecteur est devenu lui aussi créateur de contenu, elle souhaite préserver la valeur ajoutée qu’apportent les éditeurs dans cet écosystème.
Avec Youboox, ils sont rémunérés en fonction du nombre de pages lues. Un business model équitable, qui permet un développement économique durable du secteur du livre. Ce dernier a d’ailleurs convaincu les 1,500 éditeurs partenaires de l’application. Elle leur permet en effet de tirer des revenus plus justes, mais aussi de toucher un nouveau public.
Quelle place pour les intermédiaires dans le futur des médias et de la lecture ?
Comme beaucoup de secteurs disruptés par le digital, celui du livre est aujourd’hui face au paradoxe de la désintermédiation. Les créateurs et les consommateurs n’ont jamais été aussi proches – ce qui pose la question de la pertinence des distributeurs (maison d’édition et média), et donc de leur avenir !
Pour Hélène, ces derniers ne sont pas amenés à disparaître, mais plutôt à se réinventer. Les distributeurs continueront ainsi de maîtriser, et surtout de bien connaître leur audience. Leur principale valeur ajoutée sera notamment de collecter de la data, et de pouvoir l’analyser pour orienter au mieux l’offre culturelle (via des services ou des contenus).
Certes, les créateurs sont devenus leur propre marque. Les auteurs fédèrent ainsi leur communauté, et sont désormais plus autonomes dans leur communication digitale. Mais les maisons d’édition restent des interlocuteurs indispensables dans les domaines de l’édition papier et de la distribution physique. Ils restent surtout des acteurs pertinents grâce à leur savoir-faire. Hélène croit donc à l’importance d’éditorialiser le contenu pour en améliorer la qualité et faire évoluer les auteurs dans leur production.
De son côté, Youboox se positionne comme un partenaire, et non comme un simple prestataire. Elle partage ainsi ses données, plutôt que de les garder secrètes. Mais l’application travaille également en synergie avec les éditeurs et les créateurs pour produire des séries audio et développer des contenus originaux. Des collaborations qui permettent d’accompagner l’évolution des pratiques de lecture. Et de s’adapter aux consommateurs, à la recherche de médiums plus flexibles pour se plonger dans de nouvelles histoires.
Comment se différencier dans un océan de contenu ?
Au vu de ces facilités pour créer et diffuser du contenu, mais aussi améliorer ses relations avec son audience, une autre question se pose… Comment, dans une marée de contenu, se différencier en tant qu’auteur ou éditeur ?
Beaucoup de créateurs craignent en effet de se lancer par peur de ne rien apporter de nouveau. Pour Hélène, la clé n’est pas de chercher à se différencier à tout prix. Mais plutôt de soigner la qualité et la pertinence de son contenu… Bref, de trouver sa plume !
Elle observe également l’apparition de dynamiques collectives auprès des jeunes auteurs. Ces derniers s’emparent en effet de thèmes communs, qui leur tiennent à cœur et leur permettent de faire bouger les lignes. Les témoignages autour du mouvement #Metoo ou de l’écologie par exemple, restent des prises de paroles individuelles et singulières, tout en s’inscrivant dans un ensemble plus vaste de productions culturelles.
Ils se font aussi l’écho de l’évolution des pratiques de consommation. En effet, la lecture devient elle aussi un acte militant, ou tout du moins porteur de sens.
Éviter les écueils de la démocratisation du contenu
Mais la démocratisation en termes de création et de consommation de contenu n’a pas que du bon. On peut aussi s’inquiéter de la prolifération des contenus violents (qui provoquent même, chez les modérateurs, du stress post-traumatique). Ou encore de la polarisation de l’information et des bulles idéologiques encouragés par les algorithmes.
Pour Hélène, ces écueils montrent l’importance des distributeurs, et surtout de leur rôle de curation de contenu. C’est en proposant un contenu diversifié, adoptant différents points de vue, que l’on peut éviter ces dérives.
Pour nourrir notre esprit critique, Youboox mise sur deux outils complémentaires. Son algorithme de recommandation d’abord, qui permet de proposer des contenus pertinents de manière personnalisée. Mais aussi à travers un responsable éditorial qui va proposer des contenus en fonction d’un thème défini ou de l’actualité. Une approche qui permet donc de sortir de sa coquille, et de découvrir des sources de réflexion diversifiées et riches.
Les marques peuvent-elles devenir des médiateurs culturels ?
La culture étant un puissant vecteur d’images, il est aussi très intéressant pour les marques de se positionner sur ce type de service. Pour capitaliser sur la création de contenu, il faut néanmoins que leur storytelling face sens et surtout écho aux aspirations de leur communauté. Le livre devient ainsi un prolongement culturel du positionnement de l’entreprise.
C’est ce qu’a réussi à accomplir Louis Vuitton, qui a créé sa propre maison d’édition de guide de voyage. Une stratégie pertinente, puisqu’elle lui permet d’amplifier son univers de marque autour du bagage et de l’évasion. YouBoox accompagne d’ailleurs les entreprises dans cette démarche, en proposant par exemple une bibliothèque exclusive dans les hôtels Accor. Ce service permet au groupe hôtelier de s’adresser aussi bien aux clients qui voyagent pour le plaisir que pour le business. Et surtout de faciliter la digitalisation de son expérience d’accès à la presse.
Quel avenir pour le livre ?
Si le livre n’a fait qu’entamer sa révolution digitale, elle est loin de s’arrêter à un changement de support. Pour Hélène, son futur sera résolument audio. Ce format permet en effet de lire n’importe où et n’importe quand…
Pour que la lecture s’inscrive pleinement dans notre quotidien, le livre devra encore subir quelques transformations. Et ce, notamment via la production de séries audio. Mais aussi en devenant multi-usage (passant de l’audio à l’écrit) et donc mieux à même de s’adapter au lecteur et à l’expérience qu’il recherche à un instant T.